Pauvre saumon ! Le saumon est devenu le poulet de la mer, c’est-à-dire aussi malmené que ce pauvre volatile. Bien sûr pas de cage trop petite pour le saumon, pas de hangar insalubre, le saumon reste élevé en mer, mais grosso modo dans les mêmes conditions que le poulet. Des filets trop petits et surpeuplés, de la nourriture bas de gamme, des produits pharmaceutiques à foison pour les faire grossir plus vite, voire des manipulations génétiques à la limite du supportable.
Autrefois le saumon était abondant dans les rivières françaises. Il vit dans la mer, mais remonte les rivières au moment de la ponte. Ce qui permettait au paysan de les récupérer à certaines périodes de l'année. Pollution, artificialisation des rivières, barrages ont fait disparaître ce poisson.
Et le saumon sauvage de l'Atlantique ne va pas mieux, il a presque disparu des étals. Et quand il existe, son prix est dissuasif.

La France est championne du monde dans la consommation de saumon, consommé sous toutes ses formes, plats cuisinés, sushi, frais, fumé, à toutes les sauces dans les restaurants. Il faut dire que le filet est bien pratique, pas d'arêtes, prêt à cuire, pas cher. C'est du saumon d'élevage, et la filière, malgré l'image des eaux pures des mers du Nord de l'Europe, pratique des méthodes purement industrielles.
D'abord la nourriture. Le saumon est nourri avec des farines de poisson. Il y a donc des bateaux usine qui sillonnent les mers du globe pour pêcher n'importe quoi et faire de la farine.
Puis l'élevage, le saumon est un grand migrateur qui parcourt de grandes distances quotidiennement. Difficile dans les cages immergées des fjords de Norvège ou d'ailleurs.
Enfin les maladies, les saumons trop nombreux dans de petits espaces se refilent des tas de maladies et sont parfois décimés par des virus agressifs.
Bien entendu, il y a des pratiques plus vertueuses, mais le prix s'en ressent et les saumons de qualité ne sont pas utilisés dans les plats préparés.

Et une pratique nouvelle est en train d’apparaître. Soucieuses de produire au meilleur prix près des lieux de consommation, les industriels norvégiens – et bien entendu tous les autres – ont imaginé des fermes aquacoles en France pour produire des saumons hors mer. Résultat : des terres cultivables envahies de hangar à poisson, des quantités d'eau pharaoniques, forcément des déchets, contre quelques emplois locaux et des bénéfices conséquents. Même traitement que le poulet !